Blue Cube & Golden Club.
David Lynch et le design d’(hyper)espace.
carnet de recherche
Communication dans le cadre du colloque international “David Lynch et les arts”. Bordeaux, 6–8 décembre 2017.
Organisation : Emmanuel Plasseraud, Pierre Beylot, Clément Puget
Les exégèses à propos de la mystérieuse boîte bleue de Mulholland Drive sont nombreuses. Il faut
dire que l’accessoire (qui n'a jamais si mal porté son nom), joue dans le film
un rôle de tout premier ordre. La boîte est le point d’accès par lequel
le spectateur se retrouve absorbé dans la dimension pluriverselle du récit. Pensé et désigné
comme un pur contenant, une béance, le cube fonctionne comme un embrayeur, une copule.
Il assure la transition du rêve vers la réalité, le passage d’une temporalité vers une
autre. Mais l’objet est aussi l’opérateur topologique grâce auquel des espaces s’emboîtent
indéfiniment les uns dans les autres. Car dans cet univers Carrollien, le coffre est ce qui ouvre,
déchiffre la clé et non l’inverse...
La porosité du cinéma vers les autres activités artistiques de David Lynch trouve ainsi dans Mulholland Drive l’un de ses motifs les plus explicites. La trouée de l’image engage ici une lecture intermédiale de ses différentes pratiques. Car la boîte bleue souligne idéalement la relation d’un média à un autre, en ré-articulant d’abord le format du pilote de série télé vers celui du film de cinéma. Elle pointe aussi, au cœur du film mais pas n’importe où — dans le Club Silencio — une bifurcation (une sorte d’hyperlien) vers d’autres centres d’intérêt du réalisateur que sont le design et l’architecture.
Notre intervention se propose d’explorer plus précisément ce point d’articulation et de basculement paradigmatique où l’objet “chosifié”[1] permet de passer de la surface du film à la troisième voire quatrième dimension de l'espace. Nous interrogerons le rapport entre la conception d’accessoires pour ses films et l’édition de mobiliers auxquelles Lynch a travaillé, à travers le cas particulier du Club Silencio, théâtre de fiction dont le réalisateur a supervisé la création et la mise en œuvre bien concrète au centre de Paris, dix ans après la sortie du film. Nous aborderons ainsi sa collaboration avec le designer Raphaël Navot et l’agence d’architecture ENIA pour la réalisation de ce nouveau Cabaret Voltaire[2], doré à la feuille...
Si David Lynch explique s’être mis à faire des films pour mieux “entrer dans ses peintures”[3], nous formons l’hypothèse qu’il a pu s’intéresser au design d’espace pour pénétrer un peu plus profondément dans ses films.
[1] AUMONT Jacques, « L’objet cinématographique et la chose filmique », in Dispositif(s) du cinéma (des premiers temps), Cinémas, Volume 14, numéro 1, Automne 2003, pp. 179-203. [2] “C’est un lieu d’échanges et de rencontres qui revendique l’héritage des salons, des cercles littéraires parisiens du XVIIème siècle, des clubs de Londres du XVIIIème siècle, des dadaïstes du Cabaret Voltaire à Zurich, des existentialistes du Tabou à Saint-Germain des prés, tout autant que du Palace à Paris et du Studio 54 à New York.” Texte de présentation du Silencio : http://www.silencio-club.com/fr [3] CHION Michel, David Lynch. Éditions de l’Étoile / Cahiers du Cinéma. Collection “Auteurs”. Paris. 2007. Page 204.
Publication dans la revue LIGEIA 2018/2 (N° 165-168)︎
La porosité du cinéma vers les autres activités artistiques de David Lynch trouve ainsi dans Mulholland Drive l’un de ses motifs les plus explicites. La trouée de l’image engage ici une lecture intermédiale de ses différentes pratiques. Car la boîte bleue souligne idéalement la relation d’un média à un autre, en ré-articulant d’abord le format du pilote de série télé vers celui du film de cinéma. Elle pointe aussi, au cœur du film mais pas n’importe où — dans le Club Silencio — une bifurcation (une sorte d’hyperlien) vers d’autres centres d’intérêt du réalisateur que sont le design et l’architecture.
Notre intervention se propose d’explorer plus précisément ce point d’articulation et de basculement paradigmatique où l’objet “chosifié”[1] permet de passer de la surface du film à la troisième voire quatrième dimension de l'espace. Nous interrogerons le rapport entre la conception d’accessoires pour ses films et l’édition de mobiliers auxquelles Lynch a travaillé, à travers le cas particulier du Club Silencio, théâtre de fiction dont le réalisateur a supervisé la création et la mise en œuvre bien concrète au centre de Paris, dix ans après la sortie du film. Nous aborderons ainsi sa collaboration avec le designer Raphaël Navot et l’agence d’architecture ENIA pour la réalisation de ce nouveau Cabaret Voltaire[2], doré à la feuille...
Si David Lynch explique s’être mis à faire des films pour mieux “entrer dans ses peintures”[3], nous formons l’hypothèse qu’il a pu s’intéresser au design d’espace pour pénétrer un peu plus profondément dans ses films.
[1] AUMONT Jacques, « L’objet cinématographique et la chose filmique », in Dispositif(s) du cinéma (des premiers temps), Cinémas, Volume 14, numéro 1, Automne 2003, pp. 179-203. [2] “C’est un lieu d’échanges et de rencontres qui revendique l’héritage des salons, des cercles littéraires parisiens du XVIIème siècle, des clubs de Londres du XVIIIème siècle, des dadaïstes du Cabaret Voltaire à Zurich, des existentialistes du Tabou à Saint-Germain des prés, tout autant que du Palace à Paris et du Studio 54 à New York.” Texte de présentation du Silencio : http://www.silencio-club.com/fr [3] CHION Michel, David Lynch. Éditions de l’Étoile / Cahiers du Cinéma. Collection “Auteurs”. Paris. 2007. Page 204.
Publication dans la revue LIGEIA 2018/2 (N° 165-168)︎